Créée à Rennes (35) en 2016, la société Hogo Business Services s’est imposée dans la cybersécurité industrielle grâce à ses solutions adaptées aux secteurs sensibles. Portée par l’ambition de ses 3 fondateurs, l’entreprise a accéléré son développement international en intégrant notamment, le programme BCI Inside DGA. Quentin Ruillère, co-fondateur et CEO de Hogo revient sur l’origine de l’entreprise, ses marchés cibles et l’impact du soutien de Bretagne Commerce International (BCI) pour structurer sa stratégie internationale.
Pouvez-vous revenir sur la création de Hogo et sur son activité ?
Nous avons fondé Hogo à trois associés, chacun issu de secteurs industriels. Pour ma part, je venais du secteur de l’énergie, Laurent Collet, de la défense et Franck Di-Nocera avait une double expertise notamment aéronautique. Nous avons observé un véritable manque de solutions de cybersécurité pragmatiques adaptées au monde industriel. Dès le départ, notre ambition a donc été de proposer des produits “sur étagère”, prêts à l’emploi, privilégiant l’efficacité opérationnelle plutôt que le conseil ou l’audit traditionnel, même si nous proposons désormais quelques prestations associées. Notre objectif est de répondre à des besoins très concrets de sécurisation des échanges de données entre l’extérieur et l’intérieur des organisations.
Les “stations blanches” sont notre produit phare. Ce sont des dispositifs permettant de sécuriser efficacement les transferts de données, que ce soit entre différentes zones internes de l’entreprise ou bien entre l’extérieur et l’intérieur. Concrètement, ces stations assurent une coupure de flux lors de l’introduction de supports amovibles (clé USB, DVD, disque dur ou partage réseau), et procèdent à diverses analyses automatiques (antivirus, typologie de fichiers, vérification de conformité) pour empêcher tout élément malveillant d’atteindre le réseau interne.
Auprès de quels secteurs d’activités intervenez-vous ?
Nous concentrons nos efforts auprès de trois secteurs principaux. Tout d’abord, la défense, qui représente une grande partie de notre activité du fait de ses besoins exigeants. Ensuite, les industries dites “réglementées” ou à forts enjeux (transport, santé, chimie, pharmacie…), qui subissent fréquemment des cyberattaques et pour lesquelles la sécurisation est cruciale. Enfin, le secteur public (hôpitaux, mairies, commissariats, ministères) qui est de plus en plus sensible à la cybersécurité, surtout depuis les investissements post-crise sanitaire.
Aujourd’hui, la défense pèse environ la moitié de notre activité, le secteur public près d’un quart et les industries réglementées l’autre quart. Par ailleurs, il nous arrive d’intervenir ponctuellement à la demande de clients ayant déjà subi une attaque et souhaitant se prémunir durablement à l’avenir.
Vous travaillez tant sur le marché national qu’à l’international. Pouvez-vous nous expliquer comment s’est construite cette dimension internationale pour Hogo ?
Au départ, nos stations étaient installées dans différents pays, mais cette ouverture à l’international se faisait par l’intermédiaire de clients français qui les exportaient à travers le monde pour leurs besoins. Pendant longtemps, ce n’était donc pas de l’export au sens strict, mais plutôt une présence indirecte à l’étranger.
Il y a environ deux ans, nous avons constaté un intérêt croissant, notamment en Europe. C’est à ce moment-là que le programme “BCI inside DGA III” nous a été proposé et que nous avons commencé à structurer notre démarche internationale.
Nous avons bénéficié d’un réel soutien de proximité et sur la durée.
Pouvez-vous nous présenter le programme DGA et nous expliquer ce qu’il vous a apporté ?
Le programme BCI Inside DGA nous a été présenté comme une initiative commune de la DGA et de BCI visant à accompagner les entreprises bretonnes avec une ambition internationale, que ce soit pour le secteur civil ou militaire. Nous avons tout de suite été intéressés, d’autant que nous avions déjà travaillé avec BCI lors de précédents salons. Participer à ce programme est donc apparu comme une évidence. Cela nous a permis de clarifier notre envie d’international, qui était latente, sans jamais avoir été réellement formalisée.
Par ailleurs, étant une petite équipe, il nous était impossible de recruter une personne dédiée à ce sujet très spécifique. Grâce à l’accompagnement de BCI, nous n’avons jamais été seuls, nous avons bénéficié d’un réel soutien de proximité et sur la durée.
Un autre avantage essentiel est l’accès quasi immédiat à un réseau d’experts. Dès que j’ai une question, que ce soit sur le commerce international, le droit douanier ou l’implantation à l’étranger, je peux solliciter un interlocuteur unique, le chargé d’affaires en l’occurrence, qui me met rapidement en contact avec la bonne personne. Cela nous fait gagner un temps précieux et simplifie grandement l’accès à l’information.
En résumé, intégrer le programme DGA a représenté, au-delà du gain de temps, une centralisation des informations et un accompagnement de proximité à 360 degrés. Cela a été un véritable accélérateur pour notre activité.
Quelles ont été les étapes clés de ce programme ?
Durant les phases d’introduction, la première étape marquante a été la mise en relation avec d’autres entreprises, en dehors de notre écosystème habituel. C’était très enrichissant. Cela nous a permis d’échanger sur des sujets transversaux liés à l’international, bien au-delà des enjeux sectoriels que nous connaissions déjà.
Nous avons ensuite réalisé plusieurs diagnostics (Diag Export, Diag TACI) en lien avec les conseillers internationaux de BCI, ce qui était indispensable. Même si nous avions une expérience internationale dans l’équipe, structurer une vraie stratégie de développement à l’international est un exercice tout à fait différent. Ces diagnostics nous ont apporté un regard objectif sur nos forces et faiblesses. Ils nous ont permis d’identifier des axes de progression, notamment sur tout ce qui touche aux formalités douanières et aux exigences réglementaires. Ce sont des sujets qu’il ne faut pas sous-estimer tant les conséquences d’une erreur peuvent être lourdes pour une entreprise.
Après les phases de diagnostics, nous avons pu définir un premier plan d’action avec l’appui du chargé d’affaires. Ce suivi régulier, avec des points mensuels, nous a permis de concrétiser chaque étape : étude de marché, veille concurrentielle, analyse produit, etc.
Dans le cadre de l’étude de marché européen, l’Allemagne est rapidement apparue comme une évidence.
Quels critères sont entrés en ligne de compte pour l’Allemagne ?
Jusqu’à présent, on voyait nos stations s’installer en Allemagne, sans stratégie internationale formalisée. Mais très vite, cela est devenu un véritable axe de développement pour nous, d’autant que nos produits répondaient à une demande réelle sur ce marché.
L’étude concurrentielle nous a confortés dans le potentiel de l’Allemagne. Le marché y est moins saturé qu’en France, où nous sommes déjà trois acteurs majeurs sur le secteur de la “station blanche”. Le secteur industriel y est particulièrement développé, tout comme la maturité autour des enjeux de cybersécurité. Sur le plan réglementaire, l’Allemagne se rapproche beaucoup du cadre français, notamment pour la défense, où les exigences sont encore très nationales. Tous les critères étaient donc réunis : un marché dynamique, des usages proches des nôtres, une réglementation sensiblement équivalente à la France.
Comment avez-vous abordé le marché germanique ?
Nous avons fait le choix d’ouvrir un bureau sur place. Pour cela, nous sommes passés par la CCI France en Allemagne. Nous avons consulté l’ensemble du réseau de prestataires agréés de BCI et avons validé nos choix, entre autres lors de notre rencontre avec Antoine Chardin à l’OPEN de l’international. Nous avons pu obtenir rapidement un bureau en espace partagé à Francfort. À ce jour, nous avons une personne qui travaille entre la France et l’Allemagne.
Pour l’instant, nous n’envisageons pas encore d’ouvrir une filiale en Allemagne. Nous avons conscience qu’une présence locale serait un vrai atout pour rassurer les clients allemands et offrir davantage de stabilité. Toutefois, les démarches administratives y sont complexes, nécessitant notamment le passage devant notaire et un apport en capital important. Il est préférable d’attendre que notre activité soit suffisamment solide avant de franchir ce cap.
Même si le processus de recrutement semble long, il faut être persévérant et ouvert aux rencontres.
Comment s’est déroulé le recrutement de votre collaborateur en Allemagne ?
Le recrutement a été nettement plus long que ce que j’avais imaginé. Nous avons d’abord cherché à recruter un VIE sans succès, puis exploré la piste d’un profil franco-allemand. Comme personne ne maîtrisait la langue au sein de l’équipe, embaucher une personne uniquement germanophone représentait un risque. Notre cahier des charges était exigeant car nous voulions absolument un profil technique, commercial, expérimenté et bilingue. Nous avons envisagé des solutions en Belgique, au Luxembourg ou en Suisse où les profils bilingues sont nombreux, mais le coût salarial y est bien supérieur. Finalement, le hasard nous a bien servis, puisqu’une candidate franco-allemande, qui postulait initialement un poste en France, a retenu notre attention. Elle a intégré notre équipe en fin d’année dernière.
Située entre Rennes et Francfort, sa présence a dynamisé notre présence commerciale en Allemagne. Nous avons renoué des contacts en allemand, ce qui représente un changement profond dans notre approche, cela rassure nos interlocuteurs locaux et instaure un climat de confiance. Nous avons aussi pu lancer une version allemande de notre site web, envoyer des emailings ciblés et adapter nos documents commerciaux tout en conservant une vérification interne de la cohérence des traductions. Pour l’ensemble de l’équipe la présence d’un collaborateur germanophone a concrétisé notre orientation internationale et insufflé une nouvelle dynamique en interne ce qui est une vraie réussite pour nous.
Même si le processus de recrutement s’étale parfois sur six mois, il faut être persévérant et ouvert aux rencontres. C’est ainsi qu’on trouve les bonnes solutions. Pour une PME comme la nôtre, cela demande de s’adapter à des temporalités inhabituelles, mais ça en vaut la peine.
Quels sont vos projets à l’international aujourd’hui ?
Notre chiffre d’affaires à l’export se partage à parts égales entre l’Allemagne et la Belgique. Nous avons des contacts en Espagne, au Canada et au Royaume-Uni, mais l’environnement international rend actuellement ces opportunités plus difficiles à concrétiser. Le marché britannique, par exemple, nous intéresse beaucoup, mais le contexte post-Brexit n’en fait plus une priorité pour nous. Nous restons donc ouverts aux opportunités, tout en nous concentrant sur les marchés à plus fort potentiel pour ne pas nous disperser, d’autant que le marché français reste très dynamique pour Hogo.
Nous participons aux salons majeurs du secteur. Nous avons notamment pris part à l’IT-SA de Nuremberg pendant deux années consécutives ; c’est un événement central dans le domaine de l’IT, avec un accent particulier sur la cybersécurité. Plus récemment, nous étions présents à Bruxelles pour le Cybersec Europe, et nous préparons activement notre participation au French Tech Tour Benelux qui se tiendra en novembre 2025.
Il n’y a rien de plus efficace que de se déplacer et rencontrer des acteurs locaux. Cela nous permet de mieux comprendre les spécificités, les besoins et d’adapter notre approche commerciale. Ce sont ces rencontres directes qui nourrissent vraiment notre développement à l’international.
Enfin, nous nous sommes fixés des objectifs précis, notamment pour répondre aux exigences de Bpifrance dans le cadre de l’assurance prospection. Leur soutien nous a permis d’accélérer notre croissance à l’export et nous sommes désormais très proches d’atteindre ces objectifs.
2026 pourrait être une belle année pour nous !