Mis à jour le 24/09/2025
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La maximisation du gain économique pour des productions gourmandes en eau dans les régions où les aquifères et les réservoirs atteignent des niveaux historiquement bas pourrait vite devenir un véritable casse-tête en matière de durabilité pour les exportateurs.
Que l’on pense à l’eau en bouteille, à l’eau en tant que matière première de produits transformés ou aux flux d’eau indispensables pour d’innombrables process industriels, le commerce de l’eau a des implications économiques profondément enracinées dans les enjeux environnementaux et géopolitiques, en particulier à l’international.
Le marché de l’eau reflète un réseau complexe d’accords gouvernementaux, de politiques publiques et d’intérêts économiques sous-tendus par la nécessité et la survie.
Cependant, les flux de l’eau tendent à rester « virtuels », invisibles dans les produits finaux commercialisés. Les besoins peuvent aussi varier grandement selon les régions de production de ces marchandises, rendant la lisibilité de leurs empreintes hydriques en amont et en aval d’autant plus complexe.
La communauté internationale en alerte
En 2023, la communauté scientifique a plus que jamais alerté l’opinion publique sur la disponibilité des ressources hydriques, pointée comme l’un des problèmes les plus urgents à résoudre parmi les « poly-crises » auxquelles sont actuellement confrontées les sociétés. La collaboration scientifique est une pierre angulaire essentielle pour limiter les tensions, la diplomatie en est une autre. Alors que les relations entre les pays et les États qui partagent des sources d’eau s’aggravent en raison d’une « pénurie mondiale de l’eau » qui pourrait « échapper à tout contrôle », la diplomatie internationale s’est remobilisée sur le sujet de l’eau dans le sillage de la conférence des Nations unies sur l’eau à laquelle les dirigeants du monde entier ont assisté en mars 2023.
À cette occasion, l’ONU a publié les résultats d’une consultation menée auprès des représentants des gouvernements ainsi que des communautés de spécialistes et de parties prenantes sur leurs priorités en matière de gestion de l’eau.
Au-delà des domaines de l’éducation, de la science et de la technologie, un consensus s’est dégagé sur un besoin accru d’accéder à des données de qualité, aux connaissances relatives à la gestion de l’eau (y compris auprès des communautés autochtones et des populations locales) et aux sciences ouvertes, tous jugés essentiels.
Pour accélérer de nouvelles solutions en matière de gestion hydrique et leur adoption à grande échelle, un meilleur partage de la recherche académique est jugé souhaitable, de même pour la recherche industrielle.
Un secteur privé qui se remobilise sur le sujet
Vouée à adopter l’approche la plus circulaire possible faute de pouvoir viser un objectif « zéro eau », l’innovation dans le domaine de l’eau attend de recevoir des soutiens concrets de la part des industries et des financeurs. Au-delà des outils permettant d’évaluer les empreintes hydriques à l’échelle individuelle ou sectorielle, et malgré des annonces de programmes de gestion globale de l’eau par nombre de multinationales, les réponses des industriels étaient plutôt restées discrètes sur la gestion de l’eau en tant que ressource partagée.
En 2023, la notion de « sobriété hydrique » a toutefois fait du chemin dans la communication des entreprises, en particulier dans des secteurs comme la chimie, les biens de consommation courante, ou la construction. Réunis à Stockholm pour la World Water Week en septembre 2023, les dirigeants d’entreprise ont examiné le rôle que pourrait jouer le secteur privé dans la résolution des plus grands problèmes liés à l’eau dans le monde, tout en examinant les risques financiers liés à ces impacts sur l’eau, qui se matérialisent de plus en plus.
Dans le cadre de la Valuing Water Finance Initiative impulsée par la fondation Ceres, ~90 investisseurs se sont en effet engagés à interpeller ~70 entreprises ciblées pour leur forte empreinte sur l’eau afin de les inciter à placer le risque lié à l’eau au premier plan de la gestion et de la planification de leurs risques à l’horizon 2030. Ces investisseurs, qui gèrent collectivement ~17 000 Mds$ d’actifs, ont établi un benchmark basé sur un ensemble de 6 attentes à l’égard des entreprises en matière d’eau :
- produire une évaluation complète des risques liés à l’eau en n’omettant pas de cible clé pour la chaîne de valeur ;
- fixer des objectifs ambitieux en se concentrant sur les processus et actions nécessaires pour réduire l’impact, en particulier dans les bassins hydrographiques à risque ;
- encourager les fournisseurs à adopter des pratiques de gestion durable de l’eau (amélioration de la qualité, approvisionnement responsable, dialogue et collaboration avec les parties prenantes) ;
- mettre en œuvre des approches intégrées reliant l’eau et les objectifs en matière de climat et de biodiversité ;
- faire progresser les défis communs liés à l’eau en favorisant les partenariats avec les fournisseurs, les communautés locales, les ONGs, les entités gouvernementales et les associations industrielles ;
- aligner les efforts de lobbying pour soutenir les politiques et les normes industrielles favorables à l’eau afin de promouvoir un changement positif et systémique ;
- veiller à ce que les administrateurs et cadres supérieurs tiennent compte des risques et opportunités liés à l’eau dans la planification d’activité et l’investissement.
“Water tech” un secteur dynamique, en quête de soutiens financiers
Alors que l’eau pourrait être un domaine à fort potentiel pour les sociétés de capital risque en raison de son aspect essentiel, les investissements dans les technologies de l’eau restent très faibles par rapport à d’autres technologies soutenues financièrement dans la lutte contre le changement climatique. Cela reflète probablement un manque de compréhension de l’eau à la fois en tant que sujet économique et en tant qu’industrie cohérente.
Seuls quelques fonds dédiés aux questions liées à l’eau peuvent être identifiés à ce jour à travers le monde et l’intérêt pourrait ne réellement se renforcer que lorsque les pénuries d’eau dépasseront un seuil critique. La plupart des investissements vont à des entreprises de pointe universitaires, en phase d’amorçage ou en phase pilote, dont la R&D porte principalement sur :
- la purification des eaux usées industrielles et des eaux contaminées par les polluants chimiques pour leur réutilisation industrielle ;
- l’optimisation de la distribution de l’eau et le monitoring des ressources en temps réel grâce à l’observation par satellite, l’IoT et les outils d’IA et de machine learning ;
- la création de nouvelles réserves extraites de l’air par des technologies d’évaporation ;
- la valorisation des eaux usées par la récupération de composés chimiques à valeur ajoutée et le bio-raffinage;
- le recyclage des eaux domestiques grâce à des systèmes en circuits fermés ;
- le traitement des eaux grises pour les rendre à nouveau potables ou les réutiliser dans des produits de consommation ;
- l’optimisation des coûts de la purification de l’eau, en particulier la désalinisation et l’auto-irrigation, avec des matériaux renouvelables et des processus alimentés par l’énergie solaire, notamment afin de répondre aux besoins des pays à faible revenu, les plus concernés par les risques de pénuries.