Mis à jour le 22/05/2023

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Depuis le vote de l’Inflation Reduction Act (IRA) en août 2022 prévoyant le déblocage d’une enveloppe de 369 Mds USD sur 10 ans sous forme de crédits d’impôts pour la transition énergétique  par exemple la production d’électricité, d’hydrogène décarboné, de biocarburant, ou encore de fabrication de composants ou équipements nécessaires types semi-conducteurs (ce qui inclut les ENR, les batteries pour véhicules électriques ou encore les panneaux photovoltaïques) les annonces liées à des projets industriels sur le sol américain se sont depuis multipliées.

Au-delà de ces subventions massives, l’objectif de cette loi est de privilégier les productions sur le sol américain en leur donnant un avantage considérable sur la concurrence importée.

Le Financial Times note que plus de 200 Mds de USD d’investissements industriels ont déjà été annoncés dans les Energies Renouvelables et semi-conducteurs depuis l’an dernier.

Le secteur automobile reste au 1er plan des projets d’investissements aux Etats-Unis quand les industriels européens redoutent de leur côté l’envahissement du marché automobile européen par les constructeurs chinois.

Quelques  annonces récentes dans la filière automobile :

  • Ford en février 2023 : création d‘une usine de batteries dans le Michigan: coût de l’opération 3.5 Mds USD
  • General Motors en avril 2023 : Investissement de 3 Mds USD dans les cellules de batteries en partenariat avec Samsung SDI
  • Tesla: construction d’une gigafactory pour les camions dans le Nevada
  • Toyota: doublement de son investissement dans les batteries en Caroline du Nord (…)

Il faut noter que les foyers américains vont également pouvoir bénéficier d’un crédit d’impôt pouvant aller jusqu’à 7500 USD pour tout achat d’un véhicule électrique produit aux USA, au Canada ou au Mexique.

Avec l’IRA, on peut déjà constater une accélération des prises de décisions de la part des industriels déjà basés aux USA qui avaient des projets à moyen terme qui veulent profiter de ces crédits d’impôts. Cette politique risque également de favoriser l’implantation industrielle de nouvelles entreprises au risque de ne pouvoir fournir le marché américain avec des produits importés dorénavant sur-taxés.

Par exemple avec la société Freyr qui annonce la construction d‘une usine de batteries aux Etats-Unis (Georgie) seulement 1 an après celle prévue en Norvège. Il faut également rappeler que l’IRA interdit le recours aux composants chinois ce qui ouvre un boulevard pour les entreprises coréennes notamment.

 

Quel est l’impacts de l’IRA sur l’ Europe ?

Grâce ou à cause de l’IRA, les industriels européens ont alertés leurs gouvernements respectifs, ce qui a favorisé la prise de conscience et le début d’une réaction des autorités Européennes.

Confrontée à une fin de non-recevoir américaine sur une revue en profondeur des mesures prévues par l’IRA, l’Union européenne a compris qu’elle ne pouvait compter que sur elle-même. C’est le sens des propositions formulées par la Commission le 1er février 2023 :

  • Assouplissement des règles relatives aux aides d’État afin de donner plus de latitudes aux États membres pour subventionner leurs industries dans les secteurs du développement durable et des énergies renouvelables.
  • Simplification des démarches administratives et mise au point d’une stratégie pour assurer la sécurité des chaînes d’approvisionnement pour les matières premières dont l’UE a besoin, notamment pour le déploiement des énergies renouvelables.

Le projet Net Zero Industry Act (accélération de la transition verte, réindustrialisation du territoire, autonomie face aux pays asiatiques) doit permettre de simplifier l’obtention des permis et des financements sur le territoire Européen.

Une première difficulté réside dans le temps dédié à la validation des projets qui pourrait durer près de 2 ans en Europe (procédure nationale et européenne puisque financements multiples) quand l’IRA annonce  un traitement des dossiers en 6 mois.

La deuxième difficulté concerne la capacité financière principalement laissé à l’initiative des Etats membres.

Le clivage traditionnel entre les interventionnistes (France, Italie, Espagne) et les libéraux (Pays-Bas, Danemark, Suède notamment) ayant bloqué toute possibilité d’avancées majeures au niveau européen. Par exemple, le Premier ministre néerlandais a récemment refusé toute possibilité d’une nouvelle émission de dette commune européenne pour financer la réponse européenne à l’IRA.

Malgré tout, on peut considérer que l’IRA aura permis une accélération de la prise de conscience et  de la mobilisation des dirigeants Européens qui après le COVID et la guerre d’Ukraine intègrent que la politique industrielle Européenne doit dorénavant prendre en compte la souveraineté dans les filières stratégiques alors qu’encore récemment la recherche d’une offre au meilleur prix pour le consommateur était le fondement des politiques commerciales Européennes (libre concurrence, anti monopole etc).